ORPHELINS SIDA INTERNATIONAL - Parrainage d’enfants - Aide aux enfants victimes du Sida

Témoignages

Sandrine et Emmanuel, parrains de Philisiwe, Afrique du Sud :

Sandrine et moi sommes les parrains de Philisiwe Mkhize, une fillette de 9 ans dont le père et la mère ont été emportés par le sida. Elle vit à Esigodini, un township à la marge de Pietermaritzburg (Afrique du Sud, province du KwaZulu Natal). En visite à Cape Town pour les fêtes de fin d'année, il était dès lors impensable que nous ne fassions pas le détour. Voici le récit de cette inoubliable rencontre.

Nous touchons Pietermaritzburg en milieu de journée, le 5 janvier 2004. La capitale provinciale s'agite sous la fournaise. Les trottoirs sont bondés et anarchiques. Indéniablement nous sommes ici en Afrique noire. Rien à voir avec l'ambiance délicieusement mâtinée de vieille Europe qui règne à 2000 km de là dans Cape Town. Notre premier souci est de rentrer en contact avec Stan Muyebe, le président et personnage central de Sinethemba (" nous avons de l'espoir ", en zoulou), la structure-relais d'OSI sur le terrain. Il vient à notre rencontre dans le centre ville, chaleureux, tout en rondeur, affublé d'une large chemise à fleurs. Une jeune femme l'accompagne, Nokuthula, fine et réservée.

Très vite nous sommes installés dans les locaux de la communauté dominicaine, dont Stan est l'un des membres, en qualité de prêtre. Il comprend notre impatience et nous invite à rendre immédiatement visite à Philisiwe. Nokuthula est forcément de la partie car elle est la seule à pouvoir communiquer avec les enfants en zoulou, Stan, lui, est originaire du Malawi et outre sa langue maternelle ne parle qu'anglais. Ensemble nous prenons la direction des quartiers périphériques, ces fameux townships, banlieues noires inventées par l'apartheid. Leur vue nous est malheureusement devenue familière au fil de nos pérégrinations dans ce pays, et sans nous y être habitués nous ne nous étonnons plus à présent de ces zones déshéritées systématiquement remisées aux abords des agglomérations. Mi-urbain, mi-rural, Esigodini s'étend sur les pentes d'un large vallon, à une dizaine de kilomètres du centre ville. Desservies par un réseau de pistes et de sentiers, les habitations sont espacées, de qualité et de taille inégales, certaines très modestes en torchis, d'autres en apparence plus solides. Stan nous guide jusque chez Philisiwe. La fillette est assise sur le seuil en compagnie de sa grand-mère, de son petit frère Andile, et de son cousin Sibusiso. Nous sommes également invités à nous asseoir. Les enfants se montrent timides, nous le sommes à peine moins, ânonnant des formules de politesse en zoulou, délivrant quelques cadeaux de France. Mais les sourires en disent long. Ce premier jour cependant nous ne nous attardons guère, la situation de s'y prête pas. Rendez-vous est pris pour le lendemain au centre Sinethemba, installé à quelques pas de là, en compagnie de tous les autres enfants.

Sinethemba loue à l'archevêché de Durban un ensemble de locaux situés à l'intérieur même du township. Ces bâtiments fonctionnels, sécurisés, construits en briques, permettent l'accueil quotidien des enfants en période scolaire. Après la classe, ils y reçoivent un repas, et participent à toutes sortes d'activités collectives. Ces locaux permettent également de mener à bien un certain nombre de projets à l'attention des adultes en charge d'orphelins. Ainsi une boulangerie doit voir le jour. Les machines sont installées, et une dizaine de personnes reçoivent une formation, afin d'être capable de faire et vendre du pain. Les revenus générés serviront à l'amélioration du quotidien des familles touchées par le fléau. Par ailleurs, un large coin potager aide à compléter l'alimentation de tous.

Le lendemain, nous retrouvons une trentaine d'enfants au centre (l'effectif n'est pas au complet, nous sommes en période de vacances scolaires), encadrés par les volunteers, des jeunes femmes bénévoles habitant le quartier. Les gamins nous gratifient d'une démonstration de chants et danses zoulous, puis ils sont invités à dessiner une carte à destination de leurs parrains respectifs (Par le jeu, nous tissons des liens plus étroits avec Philisiwe, Andile, Sibusiso et quelques uns de leurs amis. La veille si réservés, ils se montrent à présent complices, rieurs et affectueux, nous enlacent, tresse les cheveux de Sandrine... Instants magiques.
Vient déjà le dernier jour. De longue date nous avons prévu d'emmener Philisiwe à Durban, la grande ville à 80 km de là, sur la côte. Puisque par chance nous disposons d'un bakkie (sorte de 4X4 break non seulement Andile, Sibusiso et Nokuthula peuvent se joindre à nous, mais aussi Ndumiso (le seul des enfants à pouvoir aisément communiquer en anglais) et sa soeur Sthembile. Durban n'est pas une nouveauté pour eux, néanmoins la sortie revêt bien sûr un caractère exceptionnel. Au programme : trempette et éclats de rires dans les vagues de l'Océan Indien, déjeuner-dansant chez Nando's (dans ce restaurant d'une chaîne de fast-food local, Philisiwe et Sthembile ne cessent de se trémousser au rythme de la musique diffusée sur la terrasse), enfin petit tour de manège dans un parc d'attraction sur le front de mer. A la fin de la journée, émus et ravis, nous devons déjà prendre congé de tout ce petit monde...

De notre court séjour, nous retiendrons d'abord l'extraordinaire chaleur avec laquelle tous ces enfants nous ont accueillis, la dévotion sans faille de Stan et des bénévoles, l'ampleur du travail accompli, et celle du travail qui reste à accomplir. Car nous avons aussi senti s'étendre sous nos pieds l'ombre terrible de la tragédie : la maladie qui plane à l'évidence au-dessus de la tête de certains, le récit d'accidents de la vie dans des quartiers où l'horreur surgit plus souvent qu'à son tour, l'immensité des manques financiers quand il s'agit de soigner, l'inertie du gouvernement...Mais rien qui ne suffise à nous faire baisser les bras.

Emmanuel